T’as le bonjour de Maurice

Il est 7h30 sur la plage de Peyrebere. Le sable est doux, le soleil est en forme et déjà, il y a foule dans la mer. Principalement des gens d’origine indienne. Certains apprennent à nager dans une technique que je qualifierais de particulière (faute de trouver un autre adjectif) d’autres nagent tout court et la plupart fait des exercices d’aquagym. Y a pire que l’Océan Indien pour se tenir en forme. On est là en famille, les bikinis côtoient les costumes de bain intégrales, les T-shirt/leggings, les voiles sans que ça fasse polémique. Parce que la mer appartient à tout le monde et qu’il n’y a que ça d’important. On est bien, dans la joie, protégés des vagues et de l’intolérance. Regarde comme c’est beau !

*Petit café pour bien commencer la journée*

*Il est tôt mais après, il y aura plein de bouffe en tout genre sur ces étals*

*Niveau marketing et pub, y a peut-être 2 ou 3 trucs à revoir (ça passerait tellement pas en France)*

*Je te dis même pas comment elle est bonne ! (L’eau, je parle de l’eau)*

À la fin de cette journée, je repars avec une invitation à un barbecue, au resto, à la discothèque du coin, on m’a offert des litchis, un roti, une flasque de rhum bien bien entamée et un oursin mort que j’ai poliment refusé (je sais, je suis vraiment une ingrate).

D’une manière générale, les gens sont sympas ici et ils me parlent volontiers. La même conversation revient souvent :

Mais vous êtes venue seule à Maurice ?
Pas vraiment, je viens voir une amie
Oui mais toute seule ?
Ben je vais rendre visite à une amie, jsuis pas vraiment toute seule
Oui mais là vous êtes venue avec personne ?
Et alors ? Je suis pas toute seule putain puisque je te dis que je vais voir une amie !!!! C’est un crime ? Tout le monde doit être en couple ici, c’est ça ? C’EST ÇA ? Tu vas me dire quoi après ? Que j’ai pas le droit de vivre ? Que j’ai raté ma vie, hein? C’EST ÇA ? MONDE DE MERDE ! (En vrai j’ai pas dit ça parce que je suis polie et que je vis très bien mon célibat. Si si, jt’assure)

Bon je ne vais pas te mentir (jamais, au grand jamais) au milieu de la marée de couples en lune de miel, je fais clairement tâche. Je te raconte même pas le trajet. La seule célibataire de l’avion. Et vas-y que ça se roule des pelles dans les coins et que ça se susurre des mots doux... Nan mais je vous entends, en fait ! Prenez une chambre ! (Mais je vis hyper bien mon célibat. Si si je t’assure bis)

Heureusement, comme d’habitude, la nature rattrape le coup. Parce qu’elle est comme ça, la nature : généreuse. Durant ces cinq jours, les paysages que je croise sont à la fois tous les mêmes et très différents. De l’eau turquoise avec des nuances plus ou moins appuyées de vert et de bleus, du sable fin, des jolis arbres, des voiliers ou des barques de pêcheurs pour ponctuer cet océan quasi sans vagues (on dit merci la barrière de corail). C’est un petit éden… largement en train d'être bousillé par le tourisme de masse.

Car le touriste est con. Parce qu’il y a un ClubMed sur place, il croit que l’île n’est qu’un grand village vacances où il peut se balader à poil partout, grimper dans les arbres pour faire une photo ridicule (histoire vraie) et traiter les « autochtones » comme de la merde en boîte. Le touriste (voire pire, le retraité qui veut passer ses derniers jours au soleil) fait grimper les prix si bien que les habitants ne peuvent plus se permettre d’acheter une maison pour eux, fait détruire des forêts et construire des hôtels pour qu’encore plus de ses copains touristes puissent venir se balader à poil dans la rue, et ne respecte rien, (surtout) pas même les gens qui l’accueillent sur leur terre. Bientôt il ne restera plus grand chose de la beauté sauvage, on ne verra plus les filaos et les flamboyants qu’en photos alors je suis bien contente de t’en faire profiter un peu.

*Oui, les couchers de soleil sont incroyables*

Je sais que 5 jours c’est très court pour tout voir et tout faire mais de toute façon, c’était pas vraiment le but. Alors bien sûr que je profite des plages paradisiaques et des paysages cartepostalesques (oui, cartepostalesques) mais l’essentiel est ailleurs (comme la vérité). L’essentiel c’est que je retrouve Audrey. Après 10 ans, 1 mari et 2 (incroyablement beaux) enfants de son côté. Pour la petite histoire, on s’est rencontré à Lyon, à l’Université de la Mode. C’était mon phare dans la nuit, ma sagesse dans la vie, mon rire dans l’ennui et ma source de nouvelles expressions dans l’infini.

On s’est pas vraiment parlé en 10 ans à part quelques rares petits messages pour les anniversaires et les événements importants alors les retrouvailles à l’aéroport sont un peu gênées. Mais en 2 minutes, tout revient. Les « Nan mais », les « Jure » et autres « Mais pour quoi faire » (ça t’horripile quand je le fais ? Ben c’est elle qu’il faut remercier). La complicité et le rire surtout. Il ne me faut pas longtemps pour comprendre à quel point elle m’avait manqué ; sa générosité, ses râleries, ses railleries, sa façon de se frotter les yeux sous ses lunettes quand elle rit trop, et son intelligence aussi. C’est une amie comme on en a peu dans la vie, avec qui il est facile de rattraper le temps perdu et avec qui on en n’a jamais assez. J’aimerais la voir tous les jours ou tous les weekends et voir ses enfants grandir autrement qu’en photo.

Ce que j’aimerais surtout, c’est ne pas avoir à lui dire Allez, Salut.

*Tadaaaaa !!!!! (Je sais, impressionnant)*